24 mai 2013

NOTE : Discours du Président Obama sur la lutte contre le terrorisme : à l’ouest, rien de nouveau ?

Thierry RANDRETSA

Le Président américain Barack Obama s’est exprimé le 23 mai à la National Defence University sur le futur de la lutte contre le terrorisme. Son discours, présenté comme « majeur » pour le second mandat du Président Obama, constitue à ce jour son plus long plaidoyer en faveur des drones. Pour autant, il est loin d’avoir répondu à toutes les interrogations que suscite ce programme. Nous nous concentrerons sur l’un de ses aspects les plus controversés : l’usage de drones de combat à des fins létales dans des zones n’étant pas le théâtre d’un conflit armé.

La capture préalable à l’option létale

Selon le Président Obama, les États-Unis sont moins engagés dans une « guerre globale contre la terreur » que dans une « série d’efforts persistants et ciblés destinés à démanteler les réseaux spécifiques d’extrémistes violents qui menacent l’Amérique ». Cette approche nécessite la mobilisation de « tous les éléments de la puissance nationale pour gagner la bataille des volontés et des idées ». Comme il le déclarait en septembre 2012 sur CNN, confirmé entre-temps par le Livre blanc du Département de la Justice sur la légalité des attaques visant les terroristes citoyens américains de haut rang, le Président Obama a rappelé la « forte préférence » des États-Unis pour l’option non létale, à savoir le travail de renseignement, l’arrestation et la poursuite en justice des terroristes. 

Cependant, cette possibilité n’est pas toujours possible. La localisation des groupes terroristes dans des lieux éloignés, difficiles d’accès, comme les zones tribales pakistanaises, peuvent rendre difficiles le déploiement de troupes américaines à des fins de capture. Ce type d’opération peut poser des risques pour les militaires, pour la population locale, ainsi que pour les relations diplomatiques des États-Unis avec le pays sur le territoire duquel se déroule le déploiement. 

Le rappel des conditions d’exercice de l’usage de la force

Dans ces conditions, et si cet État n’a ni la volonté, ni la capacité de mettre fin à la menace (Obama insiste sur ce point à plusieurs reprises), les États-Unis s’autorisent à employer la force létale. Son usage privilégié démontre que les « efforts » mentionnés précédemment sont constitutifs d’une « guerre » menée « contre une organisation ». Obama précise que cette guerre est juste, c’est-à-dire qu’elle est menée proportionnellement, en dernier ressort et en légitime défense.

On rentre alors dans le vif du sujet des conditions d’exercice de la force létale, point sur lesquel ce discours était attendu. Pourtant, rien n’est dit qui n’ait été déjà affirmé auparavant. La légitime défense est exercée contre une menace « continue » et  « imminente », déjà évoquée dans le Livre blanc ou par Eric Holder, le Secrétaire à la Justice. S’agissant de la proportionnalité, on ne sait pas si elle relève de la légitime défense ou du droit international humanitaire. Le Président parle de la « quasi-certitude qu’aucun civil soit tué ou blessé » comme le « plus haut standard » que l’on peut fixer. Ce standard s’appliquerait indépendamment de la nationalité de la cible. Il convient de rappeler que les morts et les destructions civils sont un des éléments les plus critiqués de la politique américaine. Sont particulièrement visées les « signature strikes », soit les frappes visant les groupes d’individus ayant « une signature » similaire à un groupe armé ou terroriste, qui ne sont pourtant pas abordées par le Président Obama.

Un pas vers la transparence

Mais, pour ce dernier, le choix des drones est le moins mauvais, évitant les problèmes liés à l’envoi de troupes sur le terrain risquant leur vie, celle des non-combattants, et susceptibles de passer pour des troupes d’occupation. Pour répondre à ces critiques, il indique que son administration a renseigné les Comités idoines du Congrès sur toutes les frappes menées en-dehors de l'Irak et de l'Afghanistan. Il a également annoncé, de manière inédite, la déclassification des documents relatifs à la mort des quatre américains suite à ces actions, dont Anouar Al-Aulaqi. Au-delà, son administration vient d’élaborer un ensemble de lignes de conduites, de mécanismes de contrôle et de responsabilité sensé établir un cadre précis à l’emploi de la force létale contre les terroristes.

Vers la fin de la « guerre contre le terrorisme » ?

Au final, les frappes létales de drones sont un des éléments d’une stratégie contre-terroriste globale consistant à promouvoir la démocratie et la paix au Proche-Orient. Elles ne sont pas destinées à perdurer, car - et c’est là peut-être la relative originalité du discours d’Obama - la « guerre contre le terrorisme », comme toute guerre, doit se terminer. Une affirmation claire, qui semble pourtant contredit par l’obligation de continuer « l’effort systématique de démanteler les organisations terroristes ».

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